Khorgos et la coopération sino-kazakhe

La présence accrue de la Chine dans la région représente une opportunité de développement pour Khorgos, au Kazakhstan.
khorgos

À l’issue du Sommet Chine-Asie centrale qui s’est tenu à Xi’an les 18 et 19 mai, en présence des dirigeants chinois et des cinq républiques d’Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizstan, Tadjikistan, Turkménistan et Ouzbékistan), les relations entre la Chine et l’Asie centrale devraient se consolider. La présence accrue de la Chine dans la région représente une opportunité de développement pour Khorgos.

C’est au Kazakhstan que le président Xi Jinping a annoncé pour la première fois en 2013 le programme des Nouvelles Routes de la Soie, également connu sous le nom de Belt and Road Initiative (BRI). Le Kazakhstan a alors saisi cette occasion pour développer ses échanges avec la Chine et espérer devenir un hub continental entre l’Europe et l’Asie. Dans cette optique, le projet de Zone Économique Spéciale à Khorgos, dans la région d’Almaty, lancé dès 2011, a été accéléré.

Ce projet a réussi à attirer des investisseurs étrangers. Ainsi, en 2018, l’entreprise émiratie DP World, troisième exploitant portuaire mondial, a acquis 51% du capital du port sec de la zone économique spéciale de Khorgos. Bien que la nouvelle ville ait connu une augmentation du trafic ferroviaire entre la Chine, la Russie et l’Europe ces dernières années grâce à la BRI, les retombées économiques sur le terrain sont restées limitées.

La porte d’entrée entre la Chine et l’Asie centrale

Paradoxalement, c’est le manque de connectivité entre la Chine et le Kazakhstan qui a contribué au succès de cette Zone Économique Spéciale. En effet, les deux pays n’utilisent pas le même écartement des rails, ce qui nécessite un transbordement technique des marchandises d’un train à l’autre. Malgré la pandémie, les activités ferroviaires à Khorgos n’ont pas ralenti, bien au contraire. Avec l’interruption du transport routier entre la Chine et le reste du monde, le chemin de fer est devenu une option intéressante pour les entreprises chinoises et étrangères. Cependant, la pandémie a freiné les activités commerciales et industrielles locales. L’un des objectifs du Sommet Chine-Asie centrale était de relancer une dynamique permettant le développement économique dans la région de Khorgos.

Afin d’attirer de nouveaux investisseurs dans la Zone Économique Spéciale de Khorgos, la Chine et le Kazakhstan devront travailler conjointement sur plusieurs aspects.

Un trafic ferroviaire soutenu

Les activités de la Zone Économique Spéciale dépendent en grande partie du trafic ferroviaire entre l’Europe et la Chine. Bien que l’on observe une croissance des marchandises transportées de la Chine vers l’Europe, les échanges dans le sens ouest-est sont moins importants. La bonne santé du transport ferroviaire de la Chine vers l’Europe est le résultat des subventions accordées par les autorités locales chinoises à leurs entreprises, ce qui rend l’option ferroviaire abordable. Si les autorités locales décidaient de réduire ces subventions en raison de conditions économiques défavorables, le trafic ferroviaire pourrait en être impacté et Khorgos en souffrirait.

  • Pour développer Khorgos, il est nécessaire que la Chine et le Kazakhstan continuent à rendre le transport ferroviaire attractif pour les entreprises chinoises et étrangères, et créent de nouvelles connexions dans l’ensemble de l’Asie centrale passant par cette ville frontière.

Une plus grande coopération sino-kazakhe

Pour se développer, Khorgos a également besoin d’une coordination renforcée entre les autorités chinoises et kazakhes au niveau local. Par exemple, la décision de Pékin de mettre fin à sa politique Zéro Covid fin décembre 2022 a pris de court les autorités kazakhes qui n’étaient pas prêtes à rouvrir la frontière et à gérer les flux de voyageurs en si peu de temps, suscitant une frustration parmi les entrepreneurs frontaliers. La Zone Économique Spéciale n’a pu reprendre toutes ses activités qu’en avril 2023.

  • De nouveaux outils de gouvernance transfrontaliers, tant au niveau national que provincial, permettraient de mieux répondre aux besoins des entrepreneurs locaux.

Une lutte plus soutenue contre les trafics

En tant que ville frontière, Khorgos fait face à des problèmes de corruption. Début 2022, le président kazakh Kassym-Jomart Tokayev a constaté cette situation. Tous les droits de douane n’étaient pas perçus et les chiffres concernant le montant des échanges différaient entre les autorités chinoises et kazakhes, laissant supposer qu’un trafic illégal perdurait de la Chine vers le Kazakhstan. Depuis lors, plusieurs enquêtes ont été menées et le gouvernement de Tokayev tente de remédier aux pratiques douteuses menées par certaines administrations et entreprises à Khorgos.

  • La création d’unité mixte sino-kazakhe permettrait de lutter plus efficacement contre les trafics à la frontière et permettrait de rassurer les investisseurs.

Une accélération des projets

Malgré l’importance de Khorgos pour le Kazakhstan et la Chine, le développement de la ZES a connu de nombreux retards, et la pandémie n’a pas arrangé les choses. Ce n’est qu’en décembre 2022 qu’un accord a été trouvé pour relancer la construction du projet Kazakhstan-Chinese International Industrial New City, qui devrait accueillir de nouvelles usines financées par des capitaux chinois.

  • La réalisation rapide de ces projets prouvera aux investisseurs potentiels la volonté des autorités kazakhes et chinoises de pérenniser la ZES, car certains investisseurs étrangers ont actuellement le sentiment que Khorgos n’est plus une priorité.

Les bases d’un développement local

Les retombées économiques, autres que les échanges commerciaux transfrontaliers, sont limitées. Khorgos est encore principalement considéré comme un point de passage. Sans véritables industries, les villes de Khorgas (Kazakhstan) et Huoerguosi (Chine) n’ont pas connu de développement significatif. Il est donc nécessaire que les autorités du Kazakhstan impulsent une stratégie de développement de la ville qui accompagne l’essor de la ZES.

  • Les autorités régionales doivent être impliquées dans les politiques de développement de la ZES afin que les populations locales puissent bénéficier des retombées économiques et envisager de s’installer à proximité. Cela implique l’aménagement d’une ville entière autour de la ZES.

La guerre en Ukraine

Comme d’autres projets de connectivité, le développement de la ZES de Khorgos est influencé par le contexte géopolitique, notamment la guerre en Ukraine. L’avenir de Khorgos dépendra en partie de la résolution du conflit et de la situation économique en Russie. Le sommet qui s’est tenu à Xi’an témoigne du poids croissant de la Chine en Asie centrale. Il semble aujourd’hui évident que la Russie éprouvera des difficultés à se relever économiquement de la guerre et à investir au Kazakhstan.

  • Afin d’assurer le développement de Khorgos, le Kazakhstan devra donc privilégier les projets avec la Chine, l’Asie centrale, le Moyen-Orient et l’Europe, et attirer des investisseurs provenant de ces régions.
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